Observez-vous une évolution dans le comportement des personnes quant à l'installation de défibrillateurs dans les immeubles ?
On voit malheureusement peu de changements dans les mentalités. Les Français restent peu au fait des risques, des façons d'y remédier, des possibilités offertes et des prix des appareils cardiaques destinés à être installés dans les immeubles… C'est pour cela que nous existons et que nous essayons d'apporter de l'information. Il existe également des craintes sur le vol de ces appareils. Nous négocions la prise en charge par les compagnies d'assurance et force est de constater que le vol reste très marginal grâce à la pose des armoires avec alarme. L'association était à l'origine d'une proposition de loi en 2010 visant à « prévoir un taux particulier de TVA pour les opérations d'installations de défibrillateurs ».
Où en est ce projet ?
L'objectif était de favoriser l'installation en proposant un taux de TVA réduit. Cet objectif est toujours d'actualité ; il faut poursuivre la pédagogie notamment vers les autorités, il faut leur expliquer qu'il ne s'agit pas d'une baisse de rentrées fiscales mais que cette mesure permet au contraire d'en créer. Le taux réduit serait un formidable levier incitatif. Nous ne perdons pas espoir que notre demande soit entendue et nous poursuivons nos actions. Cette mesure, qui n'a aucun caractère politicien, est simple à mettre en œuvre. Elle ne requiert que la plus faible majorité pour décider de l'achat d'un appareil en copropriété, classe la dépense dans la catégorie des charges locatives pour que les propriétaires bailleurs soient favorables à l'installation, fait bénéficier l'achat et la maintenance des appareils d’un taux de TVA réduit.
En quoi est-ce une question de santé publique ?
Qui peut supporter de voir un proche disparaître sans pouvoir agir, alors qu'un simple appareil peut « ressusciter » quelqu'un ? De nombreux pays l'ont compris depuis longtemps. Dans les pays anglo-saxons et scandinaves, le taux de survie peut atteindre 50 %… En France, 50 000 morts pour cause d'accident cardiaque sont, en soi, une question de santé publique. Des défibrillateurs cardiaques installés dans les lieux de vie et la connaissance des « gestes qui sauvent » pourraient inverser des tendances bien négatives ! Et le prix à payer n'est pas invraisemblable : un défibrillateur cardiaque coûte moins de 2 000 € !
Quel est le pourcentage d'immeubles possédant un appareil cardiaque aujourd'hui ?
À ce jour et malgré nos efforts, ce pourcentage est malheureusement insignifiant. Mais, pour reprendre la devise de Guillaume 1er d'Orange-Nassau : « Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer ». Nous poursuivrons donc notre action.
Président du conseil syndical de la Résidence Saint Lambert Lakanal
Nous avons installé un défibrillateur dans notre immeuble en avril 2009, sur proposition de notre gestionnaire qui est à l'origine du projet : « Nous prenons notre rôle à cœur dans le 15ème ».
L'idée était de créer un événement dans un grand ensemble immobilier au cœur de Paris, pour sensibiliser les habitants aux dangers réels d'accidents cardiaques, sur les lieux de vie.
Nous sommes les premiers à avoir autorisé dans un immeuble privé du 15ème arrondissement l'installation d'un tel appareil. Notre objectif était simple : sauver des vies.
Les copropriétaires de la résidence ont en majorité été favorables à cette installation, même si nous avons essuyé les critiques de quelques-uns, qui doutaient à l'époque de l'efficacité de l'appareil. En parallèle nous avons organisé une formation pour les résidents volontaires, notre gardien ayant reçu pour sa part une formation spécifique. La formation est indispensable pour rassurer les utilisateurs potentiels et permettre à chacun de sentir concerné par le risque. Les jeunes de la résidence ont été particulièrement intéressés par la séance organisée par la Croix-Rouge et le syndic de l'immeuble. Ils sont eux les moteurs dans ce domaine, les seniors étant parfois plus dubitatifs.
Soulignons que le défibrillateur, placé au centre des parties communes dans un passage très fréquenté par les résidents, n'a subi aucune dégradation.
Maire d'Issy les Moulineaux
Comme vous le savez, l'arrêt cardio-respiratoire cause environ 50 000 morts, hors hôpital, par an en France. Je ne pouvais rester insensible à de tels chiffres compte tenu des progrès de la réanimation grâce, entre autres, à l'utilisation de défibrillateurs.
C'est pourquoi, dès 2006, j'ai fait part de ma volonté quant à la mise en place dans ma commune de défibrillateurs. Il s'agit d'un acte à la fois citoyen et d'une démarche de santé publique.
Cette démarche se veut d'emblée innovante, la commune étant première à s'équiper en Ile-de-France. Par ailleurs, je souhaitais l'implication de tous les services municipaux avec la formation massive des agents. Le rôle des conseils de quartiers me semblait également un très bon vecteur et levier quant à la mise en place de ce projet.
En décembre 2006, est lancé la première phase du projet « DEFIBRILLATEUR » ; celle-ci vise à équiper les bâtiments publics de la ville. Les défibrillateurs sont reliés soit au SAMU soit aux Pompiers de Paris. L'utilisation de ces appareils est très simple et accessible à tous publics. L'âge requis est de 10 ans (pour une utilisation simple).
La deuxième phase consistait à former 10 % de la population. Elle était plus difficile à mettre en place pour des raisons mal définies : frilosité de la population, désintérêt, égoïsme, parfois manque de conviction et souvent inquiétude de mal faire.
La dernière phase est de maintenir le parc existant, soit au total une vingtaine d'appareils installés et fonctionnels. Un film a été réalisé et figure sur le site de la ville reprenant toutes les phases de la réanimation « cardio respiratoire ». Ce film a été réalisé en collaboration avec le SAMU de Garches et la ville ainsi que la Fédération Française de cardiologie.